Le magazine trimestriel du conseil général du Tarn a fait un très bel article sur notre société.
AtoutsTARN N°83 Printemps 2010
Pastels tendres, pastels à l’huile, cires à cacheter, aquarelles, pigments naturels, encres pigmentées… La boutique est déjà à elle seule une curiosité.
Créé il y a maintenant un peu plus de dix ans, en 1999, l’Artisan Pastellier est né de la fusion du talent d’un ingénieur chimiste et d’un patrimoine renaissant de couleurs et teintes naturelles dans la région albigeoise.
Isatis Tinctoria, le pastel des teinturiers a été cultivé intensivement dès le douzième siècle dans le diocèse d’Albi, puis dans le triangle Albi, Toulouse, Carcassonne, région encore appelée « Pays de Cocagne », jusqu’au dix-huitième siècle. Sa culture a fait la fortune de grandes familles du Pays de Cocagne. Les feuilles travaillées en boules (appelées « cocas »), donnaient un bleu exceptionnel. Le pastel était réservé à la teinture des étoffes des plus riches ; les fonds de cuves servaient à fabriquer une peinture à base d’huile de lin pour la protection des volets, et des charrettes (bleu charron). En effet, les anciens avaient remarqué la propriété répulsive de ce bleu envers les insectes.
Bleu charron
Le pastel fut la seule source de teinture bleue disponible en Europe jusqu’à la fin du XVIIè siècle, avant que le développement des routes commerciales vers l’Extrême-Orient permette l’arrivée de l’indigo. « Le pastel est mort à l’arrivée de l’indigo, explique Didier Boinnard. L’indigo avait des propriétés colorantes beaucoup plus élevées que le pastel. » Le pastel avait même totalement disparu de ses anciennes régions de production. « C’est une plante qui revient de loin, poursuit notre artisan pastellier. Dans les années 80 (du siècle dernier) on ne savait plus à quoi ressemblait une graine de pastel. » Heureusement qu’un conservatoire permit de retrouver la graine disparue…
Didier Boinnard a pu ainsi raviver le flambeau des teintures naturelles. Dans son atelier, à Graulhet, les secrets sont bien gardés. « Nous avons un savoir-faire, nous n’avons pas forcément envie de divulguer à tout le monde nos recettes de fabrication, raconte Didier Boinnard. Notre fabrication se démarque par un savoir-faire garantissant le caractère original et artisanal de nos produits, leur qualité haut de gamme, dans le respect et la connaissance des normes environnementales européennes. Notre pastel tendre se différencie des autres pastels par sa texture, par le fait qu’il soit très doux et très tendre. On doit garder nos petits secrets pour nous. « Ainsi, Didier Boinnard n’emploie pas de solvant. Il privilégie les couleurs naturelles, mais aussi les « recettes » employées autrefois ; les matières premières sont donc majoritairement naturelles.
Un nouveau marché
Evidemment, le bleu de pastel est le produit phare de l’échoppe, sise dans le vieil Albi, à deux pas de la Cathédrale Sainte-Cécile, vu l’importance historique de ce colorant dans notre histoire locale et régionale. Mais la spécificité de l’Artisan Pastellier est de proposer à sa clientèle divers produits authentiques à base de couleurs naturelles, minérales ou végétales, déclinés en gamme pour les arts et la décoration. « Nous sommes dans ce que l’on peut appeler une niche. On intéresse les gens qui sont tentés par les couleurs un peu plus délicates, un peu plus rares. On ne produit pas de gros volumes, pas de grosses quantités, dit encore l’artisan pastellier. On veut garder un côté artisanal. » Ce qui ne l’empêche pas de raisonner en termes de marché : « Il faut réinventer le marché du pastel, comme celui de la garance, autre plante tinctoriale. Le pastel est cultivé en France, la garance aux Pays-Bas. Ces plantes commencent à recréer leur marché. Et en raison de l’augmentation du prix deu pétrole et de l’importance des normes environnementales, le prix du pastel est voisin du prix des couleurs et teintures artificielles.
« Pourquoi dès lors s’en priver. »